Simone Follet (1935-2021)

Simone Follet nous a quittés le 16 février 2021 ; le 23 janvier elle avait eu 86 ans et s’était réjouie de cet anniversaire. Elle s’est éteinte à Mâcon où elle passait d’ordinaire les mois d’été dans la maison de ses parents et où elle était restée cette année pour éviter le confinement parisien.

Après des études secondaires au lycée de Mâcon et une préparation au concours de l’Ecole normale supérieure de jeunes filles (« Sèvres », Boulevard Jourdan) au lycée de Versailles elle était entrée à l’ENS en 1955 (promotion littéraire). Après l’agrégation de grammaire en 1958 elle est devenue assistante à l’Université de Clermont-Ferrand avant de revenir à l’ENS en 1961 comme agrégée-répétitrice  pour y enseigner la philologie et la littérature grecques.

Nommée Directrice adjointe de l’Ecole normale supérieure de jeunes filles en 1975 (sous la direction de Josiane Serre), elle a exercé cette fonction jusqu’en 1985, c’est-à-dire peu avant la fusion des deux Ecoles normales supérieures (Ulm et Sèvres) en 1987 qui devait entraîner la disparition de ce poste.

Elle est devenue alors professeur à l’Université de Caen, puis à l’Université de Nanterre, enfin à l’Université de Paris Sorbonne – jusqu’en 2000, année de son éméritat.

Elle a dirigé une quinzaine de thèses de doctorat, a été le garant de plusieurs habilitations et a participé à de nombreux jurys. Pendant une dizaine d’années elle avait eu la responsabilité du concours d’entrée à l’ENS (Lettres). De 1981 à 1985 elle avait animé à l’ENS une Recherche coopérative sur programme du CNRS (RCP 668) intitulée « Etude de textes sophistiques et techniques tardifs ».

Simone Follet laisse une œuvre très importante, plusieurs livres et de nombreux articles dans les domaines de la philologie, de la littérature et de l’épigraphie grecques.

Outre la publication de sa thèse d’Etat Athènes au IIe et au IIIe siècle. Etudes chronologiques et prosopographiques aux Belles Lettres en 1976, S. Follet a édité les actes du colloque que l’équipe de L’Année épigraphique l’avait aidée à organiser en juillet 2000 : L’hellénisme d’époque romaine : nouveaux documents, nouvelles approches (Ier siècle avant J.-C. - IIIe siècle après J.-C.). Actes du colloque à la mémoire de Louis Robert, Paris, 7-8 juillet 2000, Paris, 2004, De Boccard (De l’archéologie à l’histoire). Et, en 2017,  elle a publié aux Belles Lettres l’Héroïque de Philostrate l’Athénien : Sur les héros. Texte établi, traduit et commenté par Simone Follet (Collection des universités de France. Série grecque, 531). Elle participait, avec d’autres, à la préparation d’une édition critique des Descriptions de Callistrate. Et elle préparait avec Bernadette Puech pour les Belles Lettres l’édition des Vies de sophistes de Philostrate.

Jusqu’à une date récente S. Follet migrait chaque année au printemps vers Athènes et y séjournait à l’Ecole française d’archéologie pour bénéficier de la bibliothèque, mener ses enquêtes dans les réserves épigraphiques du Musée national archéologique, revoir ses amis grecs et travailler avec certains d’entre eux.

Engagée dans plusieurs entreprises scientifiques pendant plus de vingt ans Simone Follet a participé à la rédaction du Bulletin épigraphique (REG, dir. Philippe Gauthier et Laurent Dubois) et de L’Année épigraphique (PUF, dir. Mireille Corbier) et à la constitution du Dictionnaire des Philosophes Antiques (CNRS, dir. Richard Goulet). Elle collaborait à la troisième édition du corpus de Berlin des Inscriptiones Graecae sur les inscriptions attiques d’époque romaine.

Membre actif de l’USR 710 du CNRS « L’Année épigraphique » du 1er janvier 1994 au 31 décembre 2013, laboratoire de recherche dont elle avait soutenu la constitution, S. Follet était très attachée à cette équipe : elle y animait un programme intitulé « Constitution de corpus régionaux ou thématiques » et participait à toutes les manifestations scientifiques. Ainsi, lors du colloque sur L’écriture dans la maison romaine, elle avait donné une remarquable communication sur une sphère inscrite du Musée épigraphique d’Athènes associant l’étude du texte et de l’image, publiée ensuite dans les Actes.

Parmi les sujets de prédilection que laisse apparaître sa riche bibliographie, on relève les noms de Philostrate (pour les multiples facettes de son œuvre) et ceux des empereurs Hadrien et Marc Aurèle, les enquêtes sur divers manuscrits, notamment ceux de Philostrate, les épigrammes, le genre épistolaire, le thème Epigraphie et littérature, les études de chronologie attique, les « raccords » d’inscriptions débouchant sur la reconstitution d’un document et son étude. – Son dernier article de ce type, publié en 2020 dans le BCH 243.2 de 2019, porte précisément sur un important document épigraphique athénien : « Bienfaits de l’empereur Hadrien envers les cités de Sardes et Synnada (IG II2 1089, complétée, et IG II2 1075, complétée) », par Simone Follet et Dina Peppas Delmousou. – L’extrême variété des personnages sur lesquels elle a écrit une soixantaine de notices dans le Dictionnaire des Philosophes témoigne de sa vaste curiosité ; invitée par Georges Tate et Mireille Corbier à participer au colloque « Comparaison entre l’Empire romain et l’Empire chinois sous les dynasties Qin et Han » (Pékin, octobre 1999), S. Follet avait choisi d’y présenter « Polybe et le monde romain ».

De bonne compagnie, d’humeur égale et de parole mesurée, Simone Follet était aussi une femme de belle stature qui aimait la vie, appréciait la convivialité de la bonne chère, des vins fins et surtout le plaisir des conversations, où elle savait faire preuve d’humour. Pleine d’énergie, elle se déplaçait toujours en voiture, notamment dans Paris, ce qui justifiait ses fréquents retards…, et n’a renoncé à conduire que récemment.

La carrière de Simone Follet a été étroitement liée à l’Ecole normale supérieure de jeunes filles avec un « cursus » à l’antique d’élève-professeur, d’enseignante de littérature grecque et de Directrice adjointe. Son propre parcours et l’attention sympathique qu’elle a portée aux dizaines de jeunes femmes qu’elle y a côtoyées ainsi qu’aux étudiantes des Universités qu’elle a orientées ont rendu Simone Follet très sensible à la promotion des femmes dans la recherche et l’enseignement – pour laquelle elle n’a cessé d’œuvrer, sans négliger pour autant les jeunes hommes qui se sont engagés dans la recherche sous sa direction ou à ses côtés. Son rayonnement scientifique s’est exercé en profondeur : par ses enseignements, ses séminaires de recherche, ses conseils personnalisés et les dizaines de manuscrits qu’elle a annotés avec minutie au crayon de son écriture fine, en précisant parfois dans la marge la portée de sa correction. Aussi les témoignages de gratitude et de dette intellectuelle à son égard ont-ils fusé de toutes parts après sa disparition.

Simone Follet était aussi une amie fidèle et ses nombreux amis resteront fidèles à son souvenir.

Mireille Corbier

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